par Pierre Andrès | Avr 6, 2025 | Moments d'histoire
Le Triangle d’or : un modèle asiatique de criminalité transfrontalière
1 Aperçu de la région
Le Triangle d’Or est le nom de la zone frontalière poreuse et sans loi où convergent la Birmanie, le Laos et la Thaïlande. Elle est depuis longtemps connue comme une plaque tournante de la criminalité transnationale et des activités illicites, notamment le trafic de drogue, la traite des êtres humains, le blanchiment d’argent, le trafic d’espèces sauvages et, désormais, la cybercriminalité. Les organisations criminelles ont su s’adapter aux évolutions politiques et économiques de la région, s’y enracinant profondément. Les capacités et les politiques des États impliqués dans la zone sont limitées, créant un environnement propice au développement des activités illicites. Des zones présentant des caractéristiques similaires, comme la frontière amazonienne , présentent des problèmes similaires. Cela montre que les zones frontalières poreuses et ingouvernables méritent une attention particulière dans la lutte contre la criminalité transnationale.
Géographiquement, la zone s’étend autour du confluent du Mékong et du Ruak. Le terrain accidenté et boisé complique les efforts de contrôle. De plus, grâce à sa situation stratégique, elle peut servir de corridor entre l’Asie du Sud-Est et les marchés mondiaux pour les acteurs nationaux, comme la Chine.
2 Contexte historique : l’opium comme activité principale
La région du Triangle d’Or est depuis longtemps associée au trafic de drogue et à la production d’opium et d’héroïne. Le terme « Triangle d’Or » a été inventé pour décrire les niveaux alarmants de culture rentable d’opium. Le secrétaire d’État adjoint américain Marshall Green est largement considéré comme l’initiateur de cette appellation, apparue en 1971.
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2.1 Les origines de la culture de l’opium
La culture du pavot à opium est historiquement typique des groupes autochtones, qui l’utilisent à des fins médicinales et rituelles. Néanmoins, les puissances coloniales ont réorienté cette tendance vers les marchés internationaux, augmentant la production tout au long du XIXe siècle. Le XXe siècle a été un tournant, notamment dans sa seconde moitié, lorsque la demande d’héroïne a explosé après la Seconde Guerre mondiale et pendant la guerre du Vietnam. C’est à cette époque que l’économie du Triangle d’Or est passée du commerce de l’opium à une industrie de production d’héroïne à grande échelle.

2.2 La montée en puissance du XXe siècle
La production annuelle d’opium a atteint entre 300 et 600 tonnes dans les années 1950, si l’on ne considère que la partie birmane du Triangle d’Or. Cette augmentation s’explique notamment par l’implication des forces du Kuomintang (KMT), troupes de l’armée de la République de Chine. Ces forces, en retraite dans la région, ont incité les agriculteurs à améliorer la culture de l’opium, allant même jusqu’à taxer leur production.
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2.3 Les années 2000 – Déclin et résurgence
Des rapports de 2003 du Service d’information des Nations Unies ont souligné un déclin de la culture du pavot à opium dans le Triangle d’Or. Les régions du Myanmar et du Laos ont enregistré une baisse de 24 % et 15 % de leurs cultures par rapport à l’année précédente, avec environ 2 000 hectares de moins consacrés au pavot à opium par rapport à 2002. Ces données ont suscité un certain optimisme, reconnaissant les efforts d’éradication déployés et les programmes de développement mis en œuvre dans la région. Néanmoins, cette période a coïncidé avec une hausse de la production de drogues synthétiques, ce qui a freiné cet optimisme.
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Des développements plus récents indiquent une forte résurgence de la production d’opium et de l’activité criminelle dans le Triangle d’Or. L’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) a signalé en 2022 une augmentation de 33 % des superficies cultivées au Myanmar. Ceci est associé à une hausse potentielle de 88 % de la production par rapport aux années précédentes. Cette augmentation s’est poursuivie régulièrement pendant trois années consécutives, à partir de 2021. On avance que des facteurs récents, notamment le coup d’État militaire de 2021 au Myanmar, les difficultés économiques découlant des sanctions et la pandémie de COVID-19, ont conduit à un retour à la culture de l’opium. Apparemment, la croissance s’est stabilisée en 2024, mais le Myanmar reste si instable qu’un retour à la hausse ne serait pas inattendu.
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Le Triangle d’Or est un lieu crucial pour les activités illicites. Historiquement, le trafic de drogue autour du pavot à opium en a été l’activité principale. Néanmoins, l’interaction entre l’instabilité politique de la région, les difficultés économiques et les réseaux criminels établis pour le trafic d’opium et d’héroïne a facilité l’essor d’autres activités illicites.
3 autres activités illicites dans le Triangle d’or
Comme le montrent les informations présentées ci-dessus, la production d’opium a toujours été au cœur des activités illicites dans le Triangle d’Or. Néanmoins, diverses activités criminelles se sont développées et propagées dans la région.
3.1 Drogues synthétiques
La production de drogues synthétiques dans le Triangle d’Or, notamment de méthamphétamine, est une autre activité criminelle importante. Mise en évidence par l’ONUDC dans les années 1990, elle a récemment connu une forte augmentation et est particulièrement répandue dans l’État Shan, au Myanmar. Le trafic de drogues se ferait, semble-t-il, à travers l’Asie du Sud-Est et au-delà. L’ONUDC affirme que la région est un important corridor de trafic de drogue. Les drogues synthétiques provenant de cette région atteignent et affectent la région Asie-Pacifique jusqu’au Japon et à la Nouvelle-Zélande.
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3.2 Traite des êtres humains
Le GovernmentAccountability Office (GAO) des États-Unis rapporte que le crime organisé transnational profite de la faiblesse de la gouvernance et de l’instabilité pour se livrer à la traite à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé. Les offres d’emploi attirent les populations vulnérables, qui se retrouvent dans des conditions d’exploitation et de semi-esclavage. Les récits de traite d’êtres humains dans la région du Triangle d’Or sont connus et confirment la théorie du GAO. Un exemple médiatisé est celui de la citoyenne malaisienne Rachel Yoong, attirée dans la région en 2022 avec une fausse offre d’emploi et séquestrée.
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3.3 Trafic de ressources naturelles
La région du Triangle d’Or est également un lieu important pour le trafic d’espèces sauvages et de produits dérivés. Elle sert de point de transit vers le marché chinois et d’autres régions d’Asie. Le rapport 2020 du Groupe d’action financière (GAFI) sur le blanchiment de capitaux et le commerce illicite d’espèces sauvages souligne la manière dont les organisations criminelles transnationales se livrent souvent à de multiples activités illicites dans des régions clés, maximisant ainsi leurs profits. Par ailleurs, l’État Shan, au Myanmar, est un haut lieu de la contrebande de bois , dont la majeure partie est d’abord dirigée vers la Chine et l’Inde, puis vers les marchés internationaux une fois rendue indétectable.
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3.4 Blanchiment d’argent
Les organisations criminelles utilisent des stratagèmes de blanchiment sophistiqués dans le Triangle d’Or. Le casino Kings Romans, situé dans la Zone économique spéciale (ZES) du Triangle d’Or au Laos, en est un exemple frappant. Ce qui se passe dans ce casino semble être une démonstration flagrante de blanchiment d’argent. Le casino et ses environs ont été construits par le chef du crime chinois Zhao Wei. Il a été sanctionné en 2018 par le Département du Trésor américain pour son implication dans des activités illicites. L’existence du système bancaire clandestin chinois facilite également ce type d’activités.
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3.5 Cybercriminalité
Récemment, des opérations de répression ont révélé des activités de cybercriminalité dans la région. Diverses escroqueries en ligne génèrent des revenus illicites pour le crime organisé. Les auteurs de ces escroqueries sont le plus souvent victimes de la traite des êtres humains, ce qui illustre une fois de plus l’interdépendance des activités criminelles transnationales. Des efforts coordonnés entre la Thaïlande, la Chine et le Myanmar ont récemment tenté de résoudre ce problème dans le Triangle d’Or et ses environs.
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4 acteurs clés
Pour mieux saisir la complexité du Triangle d’Or, il est essentiel de comprendre les acteurs impliqués dans la région, qu’ils soient affiliés à l’État ou qu’ils soient des entités criminelles.
4.1 Organisations criminelles
4.1.1 Zhao Wei
La principale organisation criminelle transnationale implantée dans le Triangle d’Or est liée au magnat chinois des casinos Zhao Wei. Elle est impliquée dans divers crimes, notamment le trafic de drogue, d’êtres humains et d’espèces sauvages, ainsi que la corruption et le blanchiment d’argent. Son champ d’action est la ZES laotienne, où le casino Kings Roman et ses environs constituent un pôle de criminalité et de blanchiment d’argent. Malgré les efforts déployés pour limiter son influence et les sanctions imposées par des acteurs internationaux, notamment les États-Unis (et potentiellement de nouveaux pays de l’UE), l’organisation est si bien implantée que ses activités ont résisté à la surveillance.

Zone économique spéciale (ZES) du Triangle d’or
4.1.2 État Shan et UWSA
Du côté birman, et plus particulièrement dans l’État Shan, la criminalité est liée aux insurgés et aux milices. Selon les autorités thaïlandaises, ces groupes armés se coordonnent avec les réseaux criminels et créent des « super laboratoires ». L’ Armée unie de l’État Wa du Myanmar (UWSA) est un acteur clé de ces activités.
Les drogues synthétiques sont produites en quantités de plus en plus importantes, notamment la méthamphétamine et le crystalmeth. Les saisies de drogue effectuées par les autorités thaïlandaises en 2024 (+172 % pour les comprimés de meth ; +39 % pour le crystalmeth) et la chute des prix de la drogue à environ un huitième de leur niveau d’il y a dix ans témoignent de cette augmentation, signe d’une forte disponibilité et d’une demande soutenue.
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État Shan (Myanmar)
4.2 Acteurs étatiques : complicité ?
L’implication des acteurs étatiques dans le Triangle d’Or est complexe. Parfois, les autorités locales et étatiques ferment les yeux et favorisent les activités illicites, tandis que d’autres tentent de garder le contrôle des forces de l’ordre.
4.2.1 Laos
L’autonomie significative de la ZES laotienne, malgré son exploitation manifeste par des organisations criminelles, suscite des inquiétudes quant à la surveillance gouvernementale. La création initiale de cette zone, et la poursuite de son exploitation malgré les pressions et les enquêtes internationales, témoignent d’une certaine complicité, ou du moins d’une gouvernance inefficace.
4.2.2 Birmanie
Le paysage politique chaotique du Myanmar est significatif pour le scénario du Triangle d’or. L’instabilité limite les efforts coordonnés pour lutter contre la criminalité. Les troubles civils persistants et le coup d’État de 2021 ont créé des vides de pouvoir. Les groupes armés les exploitent à leur avantage et gèrent les activités illicites sans grande interférence.
4.3.3 Thaïlande
Le gouvernement thaïlandais maintient une emprise très forte sur la région du Triangle d’Or. Néanmoins, les retombées affectent également la région, la corruption des fonctionnaires facilitant les activités illicites du côté thaïlandais de la frontière. Malgré les efforts déployés pour remédier à la situation, l’obtention de résultats significatifs nécessitera probablement une collaboration transfrontalière accrue et des initiatives de lutte contre la corruption.
5 Conclusion
Fort d’une longue histoire, le Triangle d’Or demeure une plaque tournante régionale du crime organisé transnational. La faiblesse de la gouvernance, la corruption et l’instabilité favorisent les économies illicites dans la région. Bien que la production et la contrebande d’opium et d’héroïne aient longtemps été les principales activités illicites, les drogues de synthèse, la traite des êtres humains et le blanchiment d’argent connaissent une forte augmentation. Le rôle joué par Zhao Wei, largement commenté par les gouvernements internationaux et la presse, illustre l’exploitation des ZES à des fins criminelles. Les tentatives de démantèlement de ces réseaux échouent. Nous concluons donc que le Triangle d’Or restera très probablement un pôle crucial de la production et du commerce mondiaux de drogue, et un refuge pour les organisations criminelles transnationales, pour les années à venir.
par Pierre Andrès | Avr 6, 2025 | Moments d'histoire
Les navires fantômes russes hantent la Libye
Le Kremlin utilise des navires de sa « flotte fantôme » – des centaines de navires commerciaux vieillissants dont le propriétaire est obscur – pour envoyer du matériel militaire à l’homme fort libyen Khalifa Haftar, révèlent des documents divulgués.

Le Barbaros, un cargo photographié en route de Russie vers la Libye.
Au printemps dernier, un cargo battant pavillon camerounais, le Barbaros, a traversé le détroit du Bosphore à Istanbul. Le Barbaros avait débuté son voyage en Russie et faisait route vers un port de l’est de la Libye contrôlé par un chef de guerre dont les forces ont été accusées de crimes contre l’humanité par une mission d’enquête de l’ONU.
Alors que le Barbaros traversait le Bosphore en avril, un observateur attentif, YörükIşık, qui dirige un cabinet de conseil analysant l’activité maritime dans le détroit, a pu apercevoir sa cargaison. Isik a publié des photos du Barbaros sur X, le décrivant comme un « navire d’intérêt » transportant des camions souvent utilisés dans des missions militaires et fabriqués par une entreprise russe sanctionnée.
Une vague d’intervention policière a suivi, selon des documents fuités provenant d’une mission navale de l’Union européenne appelée Opération Irini. Cette mission vise à suivre et à bloquer les livraisons d’armes à destination de la Libye, interdites par un embargo international sur les armes.
Les documents montrent comment des navires commerciaux – connus sous le nom de flotte fantôme – ont usé de diverses astuces pour éviter d’être repérés lors du transport d’équipements russes vers la Libye. Ils mettent également en lumière les inquiétudes croissantes des Européens quant à l’influence de la Russie dans le pays, que les responsables estiment s’inscrire dans une stratégie plus large de Moscou visant à projeter sa puissance en Méditerranée et dans plusieurs pays africains.
Après la publication des photos par Isik, Interpol a rédigé un rapport sur le Barbaros, révélant que le navire avait manipulé son système d’identification automatique (SIA), l’appareil qui transmet les informations sur la position d’un navire, afin de dissimuler sa position. Le rapport indiquait également que le navire avait changé de nom à trois reprises et s’était immatriculé sous pavillon d’un autre pays au moins dix fois depuis 2013. Le rapport estimait que le navire « pourrait transporter des armes à feu destinées à la Libye » et recommandait aux autorités de le surveiller de près.

Le ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou (à gauche), rencontre le chef de l’Armée nationale libyenne, Khalifa Haftar, en août 2017. Image : Ministère de la Défense de la Fédération de Russie
Le Barbaros était à destination du port libyen de Tobrouk, dirigé par Khalifa Haftar, un chef militaire qui domine la partie orientale du pays.
La flotte fantôme russe a enrichi Moscou en l’aidant à échapper aux sanctions occidentales sur ses ventes de pétrole, selon les États-Unis et l’Union européenne. Qu’ils transportent du pétrole ou des armes, ces navires manipulent souvent leur AIS pour éviter d’être détectés. Dans des dizaines de rapports produits en 2024, les autorités européennes ont observé comment des navires désactivaient leur AIS lorsqu’ils passaient près du port syrien de Tartous, où la Russie possède une base navale. Parfois, ces navires falsifiaient également leurs données AIS pour apparaître à un endroit différent de leur emplacement réel. Dans un autre cas, selon un rapport inclus dans les documents divulgués, un navire soupçonné de transporter des armes de Syrie vers la Libye a manipulé sa position pour apparaître au large de Beyrouth, la capitale libanaise, mais a transmis par erreur sa position comme étant sur la terre ferme à l’aéroport, plutôt que dans le port maritime.
Le 1er mai 2024, l’opération Irini, la mission navale européenne, a abordé le Barbaros et découvert 115 camions de fabrication russe. Bien que ces camions soient d’un type couramment utilisé par les militaires, ils n’avaient pas été spécifiquement modifiés pour un usage militaire et ne violaient donc pas l’embargo sur les armes. Le navire a donc été autorisé à poursuivre sa route vers Tobrouk. Néanmoins, la mission navale européenne a écrit dans son rapport interne que cette cargaison constituait « une confirmation d’une tendance à la militarisation de la région ».
Les responsables de l’opération Irini n’ont pas répondu aux questions de l’ICIJ pour cet article.
Depuis près de dix ans, Moscou soutient Haftar en armes, en argent et en personnel militaire, le plaçant progressivement au rang de principal allié en Libye. Une mission mandatée par l’ONU a rapporté en 2023 que les forces sous le contrôle de Haftar étaient coupables de « crimes contre l’humanité », et un rapport d’Amnesty International a accusé une milice dirigée par son fils de se livrer à des meurtres, des actes de torture et des viols.
Haftar père, double citoyen américano-libyen ayant résidé dans le nord de la Virginie pendant deux décennies, a fait l’objet de multiples poursuites civiles aux États-Unis, accusant ses forces d’avoir tué des civils libyens. Ces poursuites ont été classées sans suite l’année dernière, après qu’une juge a jugé qu’elle n’était pas compétente pour les traiter. Un appel de cette décision devrait être examiné par un tribunal américain en mai.
Malgré cela, les responsables occidentaux n’ont pas fait de Haftar un paria international. En août 2024, trois mois après l’arrivée du Barbaros en Italie, le commandant du Commandement américain pour l’Afrique et un haut diplomate américain ont rencontré Haftar en Libye.
C’est un témoignage de la négligence stratégique occidentale,
— Anas El Gomati, directeur de l’Institut Sadeq
Des responsables européens ont également invoqué l’influence croissante de la Russie dans l’est de la Libye pour justifier un renforcement de la coopération avec les institutions sous le contrôle de Haftar. « Ce que nous ne faisons pas à l’est, la Russie le fera », a déclaré l’ambassadeur de l’UE en Libye, Nicola Orlando, selon le compte rendu d’une réunion d’octobre 2024 au siège de la mission navale de l’UE.
La délégation de l’UE en Libye et les porte-parole du service diplomatique de l’UE n’ont pas répondu aux demandes de commentaires de l’ICIJ.
Anas El Gomati, directeur de l’Institut Sadeq basé à Tripoli, a déclaré que la présence de la Russie en Libye lui donne le contrôle des routes de trafic de migrants vers l’Europe et crée une plaque tournante pour les opérations navales à quelques centaines de milles nautiques des côtes européennes.
« La Russie a un partenariat avec Haftar, mais sa présence en Libye est bien plus liée à l’Occident », a-t-il déclaré. « L’Ukraine est le flanc oriental de l’OTAN, et la Libye le flanc sud – c’est le point faible de l’Europe. »
« Un problème de sécurité immédiat pour l’Europe »
L’intervention russe en Libye, rendue possible en partie par les opérations de sa flotte fantôme, s’est considérablement étendue depuis début 2024, selon des responsables européens.
Selon un document d’information ayant fuité, le chef de la mission navale de l’UE a été informé en juin que le nombre de vols russes vers la Libye au premier semestre 2024 correspondait au total de l’année 2023, et que la mission avait observé « une formalisation de la présence russe » au cours de l’année écoulée. Le document décrit également une augmentation des expéditions militaires russes vers le pays. « La présence navale russe en Méditerranée est un fait et nous constatons des visites régulières de la marine en Libye », indique le document d’information.
Les mercenaires du groupe Wagner, une société militaire privée russe qui opérait en Libye depuis au moins 2018, ont été supplantés en 2024 par l’Africa Corps, une unité sous le contrôle direct de l’armée russe, rapportent les documents divulgués.
Avez-vous une histoire sur la corruption, la fraude ou l’abus de pouvoir ?
L’ICIJ recueille des informations sur des actes répréhensibles commis par des entreprises, des gouvernements ou des services publics du monde entier. Nous mettons tout en œuvre pour garantir la confidentialité de nos sources.
Les livraisons d’armes russes non seulement alimentent le conflit en Libye, mais servent également à étendre son influence dans une région africaine instable et riche en ressources. Moscou utilise la Libye comme « point d’entrée pour sa voie logistique vers le Sahel », peut-on lire dans un résumé interne établi par la mission navale de l’UE à la suite d’une réunion avec l’envoyé allemand en Libye. Ce dernier n’a pas répondu aux demandes de commentaires de l’ICIJ.
Moscou a tiré des bénéfices financiers et politiques de son intervention dans cette vaste région, qui englobe dix pays. Au Niger, par exemple, l’armée russe a soutenu une junte militaire, qui a ensuite invité des entreprises russes à investir dans l’exploitation de l’uranium du pays. En République centrafricaine, des mercenaires russes ont renforcé l’emprise du président sur le pouvoir en échange du contrôle des mines d’or et de diamants.
La Russie est loin d’être le seul pays à violer l’embargo sur les armes imposé à la Libye. Un documentaire de la BBC de 2020 a retracé la manière dont des « navires fantômes » turcs transportaient des armes vers leurs alliés dans le pays, employant des tactiques similaires à celles employées par Moscou.
Mais la chute du président syrien Bachar al-Assad, proche allié de la Russie, en décembre, semble avoir incité Moscou à accroître son implication en Libye. Plus tard dans le mois, le ministre italien de la Défense a déclaré que la Russie transférait des armes de sa base navale syrienne vers la Libye. En janvier, les services de renseignement militaires ukrainiens ont nommé des navires russes qui, selon eux, se préparaient à transporter des armes de Syrie vers la Libye.

Un porte-parole des services de renseignement militaires ukrainiens a déclaré à l’ICIJ que des responsables militaires russes avaient conclu un accord avec Haftar fin 2024 pour transférer certaines unités russes de Syrie vers la Libye et moderniser l’infrastructure aérienne dans l’est de la Libye. Ils ont précisé que l’armée de l’air russe avait effectué au moins 20 missions pour acheminer du personnel et du matériel militaires de Syrie vers le territoire libyen sous contrôle de Haftar, et qu’environ 3 000 soldats russes étaient actuellement stationnés en Libye.
La Libye représente « un problème de sécurité immédiat pour l’Europe » en raison de la présence de la Russie sur place et du rôle de cette nation africaine comme voie migratoire, selon le résumé interne faisant suite à la rencontre avec l’envoyé allemand.
« Cela témoigne de la négligence stratégique occidentale », a déclaré El Gomati, directeur de l’Institut Sadeq. « La Russie a construit un nœud militaire capable non seulement de déstabiliser la Libye, mais aussi de menacer la sécurité européenne à 640 kilomètres des côtes de l’OTAN. »
par Pierre Andrès | Avr 6, 2025 | Moments d'histoire
Ouganda : le traitement de l’or alimente la criminalité
L’industrie minière ougandaise a connu une expansion remarquable ces dernières années, avec des exportations d’or en plein essor et l’émergence de nouveaux sites miniers à travers le pays. Cette croissance a créé des emplois pour des milliers de personnes. Cependant, des rapports mettent en lumière un aspect plus sombre de cet essor, révélant comment le secteur minier est empêtré dans la corruption, les conflits, les violations des droits humains et la dégradation de l’environnement.
Images provenant de : ugandainvest , Deep Earth , Infrastructure.go.ug , Solidaridad

Photographie d’une mine d’or [ source ]
1 Exportations et importations d’or de l’Ouganda
Les exportations d’or de l’Ouganda ont plus que décuplé en 2023, atteignant 2,3 milliards de dollars. Malgré les sanctions américaines contre l’African Gold Refinery, un important transformateur d’or, et son propriétaire, les autorités ont accusé l’homme d’affaires belge Alain Goetz de faire de la contrebande d’or depuis la République démocratique du Congo (RDC). Cette hausse est largement attribuée aux nouvelles capacités de traitement, notamment de l’entreprise chinoise Wagagai Mining Ltd dans l’est de l’Ouganda, ainsi qu’à la suspension des droits de douane sur les exportations d’or. Si l’Ouganda continue de s’imposer comme un pôle aurifère régional majeur, des inquiétudes persistent quant à son rôle dans le blanchiment d’or illicite, notamment en provenance des zones touchées par les conflits.
La production d’or de l’Ouganda a atteint 3 200 kg en décembre 2022, contre 2 900 kg en 2021. Au fil des ans, la production a fluctué, s’établissant en moyenne à 1 500 kg par an de 1993 à 2022, avec des hauts et des bas notables. Le pays a enregistré son pic de production à 3 400 kg en 2016, tandis que sa production la plus basse était de 0 kg en 2009. À ce jour, il s’agit des données les plus récentes disponibles, rapportées par l’US Geological Survey et gérées par le China Economic Information Center (CEIC). Elles mettent en évidence l’évolution du rôle de l’Ouganda sur le marché mondial de l’or. L’Ouganda est également classé dans le World Trend Plus Metal and Mining Sector pour le suivi de la production de métaux précieux.
Les contrebandiers importent la majeure partie de l’or en Ouganda depuis l’étranger, malgré son statut de première exportation du pays. L’or profite aux élites politiques et aux acteurs internationaux, mais contribue peu au développement économique local. Les scandales persistent, comme l’expédition controversée d’or vénézuélien à la raffinerie d’or Africa Gold en 2019, qui a tendu les relations de l’Ouganda avec les États-Unis. Aujourd’hui, le problème central reste celui des droits fonciers et de l’exploitation, en particulier à Karamoja, où la richesse en ressources naturelles entraîne souvent des déplacements et des conflits plutôt que la prospérité des communautés locales. [ source , source , source ]
2 scandales majeurs : réseaux de contrebande et acteurs clés
L’importance de l’Ouganda dans le commerce illicite de l’or a été entachée par une série de scandales et de révélations, tant historiques que récents, qui illustrent l’enracinement profond des réseaux de contrebande. Ces scandales impliquent des personnalités influentes, des contrebandiers internationaux et même la complicité de l’État, soulignant le défi auquel l’Ouganda est confronté pour assainir son secteur aurifère.
2.1 Le « scandale de l’or » de 1965
La politique, les conflits et la corruption ont longtemps façonné le commerce de l’or en Ouganda, depuis le scandale de l’or de 1965. Ce scandale impliquait Milton Obote (Premier ministre ougandais de 1962 à 1966), Idi Amin (commandant de l’armée puis dictateur de l’Ouganda de 1971 à 1979) et des allégations de trafic illicite liées aux rebelles congolais. L’or a joué un rôle essentiel dans le développement du militarisme ougandais, influençant les luttes de pouvoir et alimentant les tensions qui ont conduit à des coups d’État et à des réalignements politiques.
Les conséquences politiques furent immenses : elles ébranlèrent la confiance envers le gouvernement et alimentèrent les tensions qui conduisirent au renversement d’Obote quelques années plus tard. Cet épisode établit un modèle où les élites ougandaises exploitèrent le chaos régional à des fins personnelles, un schéma qui allait se reproduire sous diverses formes. En effet, dans les années 1970, sous le régime d’Idi Amin, des responsables ougandais pillèrent l’or du Congo, bien que la dictature militaire gardât les détails opaques. Ces cas historiques montrent que la contrebande d’or et la corruption à haut niveau sont depuis longtemps étroitement liées à la gouvernance ougandaise. [ source , source ]

Photographie de Milton Obote (Premier ministre de l’Ouganda 1962-1966) [ source

]Photo d’Idi Amin (commandant de l’armée et plus tard dictateur de l’Ouganda de 1971 à 1979) [ source ]
2.2 « La laverie automatique dorée » de 2018
Un rapport d’enquête de The Sentry, intitulé « The Golden Laundromat: The Conflict Gold Trade fromEastern Congo to the United States and Europe », révèle comment l’or de conflit provenant de la République démocratique du Congo (RDC) est blanchi via l’Ouganda et pénètre dans les chaînes d’approvisionnement mondiales, notamment celles de 283 sociétés américaines cotées en bourse, telles qu’Amazon, Sony et General Electric. Le rapport met en lumière un réseau de contrebande d’or contrôlé par le magnat belge Alain Goetz, dont l’African Gold Refinery (AGR) en Ouganda raffinerait de l’or provenant de zones de conflit en RDC avant de l’exporter vers l’Europe et les États-Unis via des intermédiaires, comme Tony Goetz NV, une raffinerie belge implantée à Dubaï. En 2017, AGR a exporté 377 millions de dollars d’or, malgré une production ougandaise nettement inférieure, confirmant les soupçons d’approvisionnement illicite.
Le rapport indique que la contrebande d’or finance les groupes armés dans l’est du Congo. Elle contribue également au conflit en cours et aux violations des droits humains, entraînant le déplacement d’environ 4,5 millions de personnes. Il appelle à des sanctions ciblées, à des mesures de lutte contre le blanchiment d’argent, à un renforcement de la réglementation bancaire et à des enquêtes sur AGR, Tony Goetz NV et les sociétés associées. Il appelle également à un renforcement des mesures de sécurité aérienne afin de prévenir la contrebande d’or. Les conclusions soulignent l’urgente nécessité d’une surveillance accrue du commerce mondial de l’or. Le conflit autour de l’or continue d’alimenter la violence, la corruption et les réseaux financiers illicites, tout en pénétrant discrètement les marchés traditionnels [ source , source ].

Photo de New Vision. Au centre, Alain Goetz, PDG d’African Gold Refinery [ source ].
2.3 Transfert d’or du Venezuela vers l’Ouganda
Un autre incident très médiatisé a mis en lumière le rôle de l’Ouganda dans le contournement des sanctions internationales. En 2019, l’AGR ougandaise a été au cœur d’une controverse après que 7,4 tonnes d’or en provenance du Venezuela – pays sous sanctions américaines – ont été acheminées par avion à Entebbe en deux cargaisons. La cargaison valait environ 300 millions de dollars. Cet incident a suscité l’inquiétude, le régime vénézuélien en difficulté cherchant à brader ses réserves d’or pour obtenir des liquidités indispensables.
Plus récemment, des vols entre Caracas et Entebbe ont alimenté les soupçons selon lesquels le gouvernement du président vénézuélien Nicolas Maduro exporte de l’or vers l’Afrique et le Moyen-Orient pour échapper aux sanctions. Les autorités ougandaises ont initialement saisi 3,6 tonnes d’or, soupçonnées d’infraction aux sanctions ou aux lois douanières. Cependant, fait surprenant, le procureur général ougandais a déclaré que l’importation d’or par AGR était légale au regard des règles ougandaises d’exonération fiscale et a ordonné le retour des lingots saisis à la raffinerie. La police a rapidement restitué l’or et s’est retirée des locaux d’AGR, donnant ainsi le feu vert à la transaction. Il est apparu par la suite que, bien qu’aucune loi ougandaise n’ait été enfreinte, le gouvernement américain avait fait pression sur l’Ouganda pour qu’il cesse ses transactions d’or vénézuélien ; le procureur général a même ordonné à AGR de s’abstenir de toute nouvelle importation en provenance du Venezuela compte tenu des sanctions internationales.
Ce scandale a mis en lumière la façon dont les politiques laxistes de l’Ouganda ont fait du pays un pôle d’attraction pour l’or « listé noire ». De l’or provenant de pays sanctionnés comme le Zimbabwe et le Soudan a également été acheminé vers l’Ouganda ces dernières années. Chaque épisode de ce type non seulement ternit l’image de l’Ouganda, mais l’expose également à des frictions diplomatiques. [ source , source , source ]
2.4 Scandales récents
Ces derniers temps, le secteur aurifère ougandais a été secoué par des scandales répétés de fraude et de contrebande. Ces scandales ont valu à l’Ouganda des gros titres négatifs dans les médias nationaux et les rapports des organismes de surveillance, qui ont décrit une « vague incessante de scandales liés à l’or ». Par exemple, Kampala a été le théâtre de nombreuses escroqueries à l’or contrefait ciblant les investisseurs étrangers.
En janvier 2025, les ressortissants kazakhs BaishevRinad et JambulovOlzhas ont accusé des hommes d’affaires ougandais de les avoir escroqués dans le cadre d’une escroquerie à la contrefaçon d’or. Ils ont été invités en Ouganda en mars 2023 par un certain Eric. Ce dernier a faussement prétendu entretenir des liens avec le président ougandais. Eric les a présentés à Joseph Akandwanaho et Joram Kamukama, des négociants en or présumés opérant sous la bannière de SeroMinerals Ltd à Kampala. Pour vérifier l’affaire, les investisseurs ont engagé l’avocat Raymond Ntende, qui leur a versé 14 000 dollars. Plus tard, ils ont affirmé qu’il était également impliqué dans l’escroquerie.
Les Kazakhs ont accepté d’acheter 25 kg d’or, en payant 113 125 $ de taxes et de frais, et ont reçu 3 kg en dépôt. Peu après, on leur a demandé 40 000 $ supplémentaires, qu’ils ont également payés. Cependant, les vendeurs ont retardé l’expédition. Lorsque les investisseurs ont exigé un remboursement, ils ont été menacés et ont découvert plus tard que l’or reçu était contrefait. Ils ont également allégué que les employés du centre de test d’Eurogold échangeaient de l’or véritable contre de faux alliages. [ source , source , source ]
3 flux d’or entre l’Ouganda et la RDC récemment
Le commerce de l’or en Ouganda demeure profondément entaché d’activités illicites. Les opérations militaires et les réseaux de contrebande façonnent son paysage économique et politique. L’armée ougandaise opère dans l’est de la RDC sous couvert de lutte antiterroriste contre les Forces démocratiques alliées (ADF), mais elle s’efforce également de sécuriser l’accès aux ressources aurifères et de contrôler les principales routes de contrebande. Les analystes affirment que la contrebande d’or alimente l’instabilité régionale.
Les rapports indiquent que les Forces de défense du peuple ougandais (UPDF) ont facilité le trafic illicite d’or. Par conséquent, cela complique les efforts de maintien de la paix. Les exportations d’or de l’Ouganda ont bondi à 2,3 milliards de dollars en 2023. Malgré une production nationale de seulement une fraction de ce montant, ce qui souligne son rôle de plaque tournante du blanchiment d’or en provenance de RDC. Un rapport d’experts des Nations Unies de 2024 a également dénoncé une entreprise basée à Kampala, MetalTesting and SmeltingCompany, pour avoir orchestré un système de contrebande sophistiqué. L’entreprise a préfinancé des contrebandiers congolais, envoyé des agents à Arua, ville frontalière du nord de l’Ouganda, et organisé des livraisons hebdomadaires de 20 kg d’or illicite.
L’entreprise a ensuite regroupé l’or et l’a exporté comme produit ougandais. Cela met en évidence la capacité d’adaptation des réseaux de contrebande malgré les scandales passés et la surveillance internationale. La persistance du blanchiment d’or – des années 1960 à nos jours – révèle le caractère lucratif et profondément ancré de ce commerce, impliquant souvent des personnalités influentes et des acteurs internationaux opérant en toute impunité. [ source , source ]
4 Conclusion
Le blanchiment d’or en Ouganda est une histoire complexe, faite d’opportunités et d’abus, où la promesse de gains économiques a été entachée par la corruption, les conflits et la criminalité internationale. Historiquement petit producteur d’or, l’Ouganda a su tirer parti des troubles régionaux pour devenir un exportateur majeur. Mais au prix de se transformer en une véritable blanchisserie d’or sale. L’impact géopolitique du commerce de l’or en Ouganda souligne qu’il ne s’agit pas d’un problème propre à l’Ouganda. Il est profondément ancré dans les conflits régionaux et les chaînes d’approvisionnement mondiales. Les conséquences économiques et sociales sur le plan national ont jusqu’à présent été à double tranchant : un boom statistique qui dissimule une pauvreté persistante et une corruption sur le terrain. Comme le montre la réponse internationale, une volonté collective émerge pour relever ce défi, en intégrant le blanchiment d’or en Ouganda dans une lutte plus large contre les minerais de conflit et les flux financiers illicites.
L’Ouganda se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins. Il peut choisir de poursuivre ses activités comme si de rien n’était – courtiser les investisseurs aurifères à tout prix et servir de plaque tournante de transit peu surveillée – mais cela risque d’aggraver la corruption et l’isolement international. Alternativement, l’Ouganda peut mettre en œuvre vigoureusement les réformes engagées, en adoptant la transparence et l’exploitation minière légale, transformant ainsi son secteur aurifère en un moteur légitime de développement. Les années à venir détermineront si l’Ouganda se défait de son image de « blanchisseur d’or » de l’Afrique. Il peut plutôt trouver un équilibre entre prospérité économique, approvisionnement éthique et paix, transformant ce qui est aujourd’hui une histoire trouble d’or blanchi en une réussite d’or propre alimentant une croissance durable
par Pierre Andrès | Avr 5, 2025 | délégation Grande Bretagne
Des espions révèlent quelques secrets dans une exposition
Le MI5, service de renseignement britannique, fête ses 115 ans avec une exposition inédite à Londres.
C’est une première pour le MI5: les renseignements intérieurs britanniques, nés il y a 115 ans, dévoilent dans une exposition à Londres, quelques-uns de leurs secrets historiques, avec des confessions d’agents doubles et bien sûr des gadgets d’espions.
Karl Muller a été l’une des premières grandes prises du MI5, en 1915. Cet espion allemand avait été repéré par les agents britanniques, mais c’est un simple citron, montré dans l’exposition «MI5: Official Secrets», qui l’a fait tomber.
5 000 employés
Muller a affirmé qu’il utilisait cet agrume, trouvé dans son manteau lors de son arrestation, pour se nettoyer les dents. Le citron lui servait en réalité d’encre invisible: dans une lettre a priori banale interceptée par le MI5, il informait ses supérieurs des mouvements des troupes britanniques pendant la guerre. Il a été exécuté peu après à la Tour de Londres.
Le MI5 avait été fondé quelques années plus tôt sur fond de peur d’une invasion allemande. Vernon Kell, un officier de l’armée, en a été le premier chef. Aujourd’hui, le MI5, le cousin du MI6, les services extérieurs rendus célèbres par James Bond, compte plus de 5 000 employés.
Des choses extraordinaires
«Ayant travaillé pour le MI5 pendant près de trente ans, je peux vous dire que la réalité de notre travail est souvent différente de la fiction», a expliqué le directeur du MI5, Ken McCallum, lors de la présentation de l’exposition, organisée avec les Archives nationales, à Kew, dans l’ouest de Londres.
«La vie du MI5, c’est l’histoire d’êtres humains ordinaires qui, ensemble, font des choses extraordinaires pour assurer la sécurité de notre pays», a-t-il ajouté.
Un obus de mortier
L’exposition qui ouvre samedi ne cache pas certains épisodes peu glorieux de l’agence. La section consacrée à la guerre froide comprend une mallette laissée dans un club londonien par le diplomate britannique, agent double russe dès la Seconde Guerre mondiale, Guy Burgess, lorsqu’il s’est enfui à Moscou en 1951 par peur d’être découvert. Elle porte ses initiales. Son passeport est montré pour la première fois.
L’exposition présente aussi une note confirmant que le secrétaire privé d’Elizabeth II avait parlé à cette dernière au début des années 70 du fait qu’Anthony Blunt, son conseiller artistique, était un agent soviétique. La reine a réagi «très calmement et sans surprise», est-il précisé.
Parmi les objets les plus récents exposés: un obus de mortier tiré dans le jardin du 10 Downing Street, la résidence du Premier ministre britannique, par l’IRA, l’Armée républicaine irlandaise, en 1991.
Exposition gratuite
L’exposition est ponctuée de commentaires d’agents du MI5, anonymes. «Les agents continuent d’être l’une des plus importantes sources de renseignements du MI5», écrivait l’un d’eux en 2024. Mais la gestion des agents reste «complexe», ajoutait-il, posant plusieurs questions: «Quelle est leur motivation?», «Disent-ils la vérité?», «Comment savez-vous s’ils travaillent pour l’autre côté?».
Pour ceux qui rêvent du MI5, des tests sont proposés, avec une question centrale: «Pourriez-vous être un espion?». Il y a un test de mémoire: «Vous avez dix secondes pour retenir le plus d’informations possible». Un autre permet d’évaluer ses compétences en décodage. L’exposition, qui est gratuite, se termine le 28 septembre.
par Pierre Andrès | Mar 28, 2025 | Délégation Sud-Est, Uncategorized
COMMEMORATIONDU 26 MARS 1962 à ALGER
Ce jour , vingt six mars ,au panoramique saint Clair à SETE , face à la stèle dédiée aux 76 enseignants tués en Algérie ,s’est pressé un petit nombre de personnes
Ceux ci originaires d’Algérie , appelés « Pieds Noirs» se sont retrouvés en ce lieu, pour commémorer , la tragédie du 26 mars 1962 , à ALGER .
En présence de deux porte drapeaux du Souvenir Français de SETE-FRONTIGNAN , de M.MERZ, accompagné d’adjoints de la Municipalité , représentant M.F.COMMEINHES , Maire empêché, de M.MULLER , Président de la Maison du Pied Noir de SETE, Mme JUAN , ancienne président du Cercle Algérianiste de SETE ( récemment dissous ) a pris la parole pour rappeler le déroulé de cette triste journée .
Ce jour là , répondant aux appels d’une organisation , une foule importante , précédée d’anciens combattants, portant fièrement médailles et drapeaux tricolores, s’est rassemblée , Rue d’Isly , face à la Grande Poste , pour soutenir et porter des vivres aux habitants du quartier de BAB el OUED totalement encerclé par les forces de l’ordre.
Après un premier barrage résistant mollement , les manifestants , pacifiques , se sont heurtés à un second barrage de soldats du 4è RT ( régiment de tirailleurs).
Ceux ci , sans sommations , ont usé de leurs armes automatiques , tirant , semble t il , plus de 1500 cartouches ,tuant , selon les sources , entré 40 et 90 morts et plus de 200 blessés dont plusieurs succomberont ultérieurement .,et ce , sans obéir aux ordres de leur officier de HALTE AU FEU
Une seule fois , le président de la République a cité cette date du « massacre de la Rue d’ISLY» il y a quelques années mais depuis , cette date est soigneusement occultée .
Cette sobre cérémonie a pris fin après la minute de silence, le chant des Africains et l’Hymne National repris à cappella avec ferveur et le remerciement aux porte drapeaux .
Le Président de la Maison du Pied Noir a invité les participants au partage du verre de l’amitié.
Texte et photos: Henri SABATIER
